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Ils sont guides, mais avant tout des chiens !
Le Chien Guide… Un chien avant tout!
Le chien guide est un chien de terrain ; il est les yeux de son maître à l’extérieur de son domicile et l’accompagne dans tous ses déplacements.
Si on lui demande d’avoir un comportement approprié notamment lorsqu’il guide, il n’en reste pas moins un chien, avec son caractère, ses qualités et ses défauts, ses humeurs, ses émotions, les associations positives ou négatives tirées des expériences qu’il vit … mais surtout c’est un être vivant avec des besoins fondamentaux et une communication propre à son espèce.
Aujourd’hui encore, malgré l’évolution de la place du chien dans notre société et de l’éducation canine, la vision du Chien Guide s’apparente toujours à celle d’un chien « robotisé », placide, qui devrait être indifférent à toute stimulation, là uniquement pour guider et n’ayant pas droit à l’erreur !
Malheureusement, cette vision nourrit l’image d’un « chien outil » et résigné.
Professionnelle de l’éducation canine et du comportement, je suis aussi déficiente visuelle et accompagnée d’un chien guide d’aveugle.
Dans cet article, je vous propose de changer votre regard sur ces poilus et leur binôme humain !
Labradors et goldens chiens guides par excellence ?
Des stéréotypes de race
Permettez-moi tout d’abord de vous présenter celle qui chaque jour fait briller mes yeux ; elle n’est pas conventionnelle !
Elle s’appelle Isis, c’est une femelle berger allemand (lignée de travail); je fais cette précision car elle n’a pas le look des bergers allemands habituels, souvent elle est confondue avec un malinois ou un beauceron. Elle est grande, majoritairement noire avec le bout des pattes et quelques taches feu ; elle a le dos droit, sans oublier ses grandes oreilles bien dressées qui font tout son charme.😉
C’est une louloutte vive, affectueuse, très expressive, sensible, débordante de joie.
Elle a eu 3 ans en mai 2020 et c’est depuis l’été 2018 qu’elle éclaire mes pas avec amour et fierté.
Originaire du Canada, elle est arrivée en France à l’âge de 6 mois et a été donnée au Centre Indépendant d’Education de Chiens Guides, situé À Vaux-le-Pénil en région parisienne. C’est cette école: « les Chiens Guides du Cœur », adepte de l’éducation moderne et bienveillante, qui l’a formée à sa mission.
Si aujourd’hui en France, 80 % des chiens guides sont des labradors ou des Goldens Retrievers, rappelons que le premier chien éduqué en 1952 était une femelle berger allemand qui venait de la SPA.
D’autres races ont été ou sont chiens guides : le caniche royal, le berger blanc suisse, le FlatCoated Retriever, le Berger Australien, le Bouvier Bernois, le Border Collie, le Barbet, le Beauceron, l’Hovawart, le Berger Belge Malinois, le Dalmatien, le Rhodésian Ridgeback, le Briard, le Berger Hollandais, l’Altdeutscher Schäferhund… j’en oublie sûrement d’autres , mais qu’importe… Ce n’est pas la race du chien qui a fait qu’il est devenu guide, c’est l’individu derrière (ses aptitudes, son caractère, sa motivation etc.).
Alors pourquoi 80% de Retrievers
Le labrador et le golden sont dit par la majorité des personnes:
- « Passe-partout : dans le sens où le grand public les apprécie et n’en a pas peur ».
- « Plus adaptable : que ce soit en terme de profils de bénéficiaires et d’environnement de vie ».
- « Facile à éduquer : car ils ont un grand attrait pour la nourriture ».
Pourtant, en moyenne en France, sur 10 chiens en formation, seuls 3 deviendront chiens guides.
Cela montre bien que beaucoup de labradors et goldens ne sont pas faits pour être chiens guides.
De même que tous les Malinois ne deviennent pas chiens de recherche et tous les Husky n’ont pas d’attirance pour les sports de traction.
Si, dans la sélection, on privilégiait une analyse éthologique en s’intéressant à l’individualité de chaque chien, plutôt qu’aux stéréotypes de race, plein de chiens pourraient être formés au guidage, qu’ils soient pure race ou croisés, issus d’élevage, de dons de particuliers ou de refuge.
Certaines écoles ont déjà cette approche et observent par conséquent un taux de réforme plus bas que la moyenne.
Le chien-guide parfait : de l'idéalisation à la réalité
Les spots publicitaires montrent le chien guide comme un héros du quotidien, ayant reçu une éducation infaillible.
Les personnes lambda se demandent alors pourquoi toutes les personnes déficientes visuelles n’ont pas de guides à quatre pattes? Tout simplement parce que dans la pratique, ce n’est pas aussi simple.
Les chiens guides reçoivent une éducation spécifique permettant de rendre les déplacements de leur maître plus sûrs, fluides et agréables.
Sous forme de jeu, ils apprennent notamment :
- À contourner les obstacles mobiles et immobiles, latéraux, au sol et en hauteur,
- À garder une trajectoire droite, indiquer les intersections et connaître les directions (gauche, droite, sers à gauche, sers à droite, tout droit, demi-tour…),
- À Trouver sur demande différents éléments urbains ( passages piétons, escaliers, transports en commun, les composteurs de tickets, les portes, les guichet, les sièges etc),
- À être à l’aise et le plus discrets possible dans les lieux publics et les transports,
- À prendre des initiatives, en cas d’obstacles sur le chemin ( voitures mal garées, travaux, vides …), le chien doit trouver la solution la plus sécurisée pour passer avec son humain.
Comme toute éducation, celle-ci n’est pas acquise définitivement ; ce que le chien a appris, il peut le désapprendre.
Plusieurs facteurs entrent en jeu tels que : les capacités du loulou à réaliser ces demandes, la socialisation qu’il a reçue, les « méthodes » utilisées pour le former, la personne à qui il a été remis, l’environnement dans lequel il évolue etc. Tout ceci influence positivement ou négativement le chien et son binôme.
Ensuite, avoir un chien guide c’est avoir la responsabilité d’un compagnon de vie , avec lequel il faut apprendre à communiquer, à se comprendre, créer une relation de confiance et répondre à ses besoins:
- Lui offrir des moments de détente où il peut courir, renifler, rencontrer et interagir avec des congénères…
- Lui proposer des activités masticatoires et divertissantes ( tapis de fouilles, jouet fourrés, activités de loisirs…)
- Lui donner une alimentation de qualité
- Lui prodiguer les soins quotidiens et faire face aux éventuelles accidents ou maladies…
En clair, tout ce qui tourne autour de la présence d’un canidé et ce n’est pas donné à tout le monde.
Il faut aussi être suffisamment autonome dans ses déplacements pour être capable de donner les bonnes indications à son loulou car ce n’est pas un GPS 😉 par exemple, lors d’une traversée de rue, le chien s’arrête au passage piéton et c’est son maître qui analyse la circulation avant de lui donner le feu vert.
Quant à la remise du chien à la personne déficiente visuelle ,il faut savoir que Médor, ne sait pas qu’il va passer une dizaine d’années avec cette personne chez qui il arrive. Pour lui c’est un changement: un nouvel environnement, des nouveaux humains, de nouvelles habitudes… autant de choses qui peuvent entraîner du stress et qui demande un temps d’adaptation .
Cela prend au moins 6 mois pour que le duo maître/chien soit totalement rodé.
En fonction des écoles de chiens guides, il est possible que le chien et la personne (malvoyante ou non-voyante), se soient rencontrés au préalable, puis qu’un temps sans guidage, de quelques jours à une semaine ait lieu permettant à ces deux êtres de faire connaissance.
Par ailleurs, forcé de constater que les personnes déficientes visuelles ne sont pas assez formées à la communication canine, aux signaux d’apaisement,… à l’aspect comportemental qui est tout aussi important, si ce n’est plus, que l’aspect guidage. Beaucoup de maîtres de chiens guides souhaiteraient avoir accès à ces connaissances.
Cela pourrait être mis en place, sous forme de préparation à l’arrivée du chien avant la remise, qui demande déjà beaucoup de temps et d’énergie à tout le monde.
Pour toutes ces raisons et parce qu’il s’agit de vivant, le chien comme son gardien peuvent faire des erreurs.
Alors, dans la rue, quand vous croisez un binôme maître de chien guide, que vous voyez la personne refaire faire une action à son chien ou le loulou qui se déconcentre, tire, ,aboie, renifle … Avant de juger et de faire une réflexion désobligeante, essayez de prendre du recul :
- Savez-vous depuis combien de temps le binôme évolue ensemble ?
- Savez-vous comment le chien a été éduqué ?
- Comment son maître a-t-il été formé ?
- Le chien ou son humain n’ont-ils pas été malades, les empêchant de travailler ensemble pendant quelques temps ?
- Ne sont-ils pas dans un environnement stressant ?
- L’humain n’a-t-il pas donné des indications contradictoires à son loulou ?
- Le poilu n’a-t-il pas vécu des expériences négatives répétées ou un traumatisme l’entraînant à réagir excessivement ?
- Une personne n’est-elle pas entrain de distraire le chien guide en l’appelant, le caressant ou laissant son chien aller au contact ?
En un coup d’œil vous ne pouvez pas avoir les éléments nécessaires à une analyse objective ; mieux vaut donc s’abstenir de tout commentaire.
Surtout, merci de ne pas perturber le chien qui « travaille », au risque de mettre la personne déficiente visuelle en DANGER ou mettre le chien en erreur.
Si vous voyez que le duo est en difficulté, vous pouvez proposer votre aide, en vous adressant à la personne qui normalement, ne mord pas. 😉
Au delà du guidage
La plupart des personnes déficientes visuelles sont sensibles au bien-être de leur loulou et tiennent à leur offrir ces moments importants pour leur équilibre ;
Toutefois, ce n’est pas toujours évident de réalisé des détentes régulières dans des conditions optimales et ce, pour différentes problématiques : manque d’espaces verts sécurisés dans leur ville de résidence, pas de covoiturage pour se rendre à des balades canines, refus par des professionnels proposant des balades de les accompagner…
Il existe un groupe Facebook appelé « chiens guides en détente » que je vous invite à rejoindre si vous souhaitez partager vos balades en véhiculant un binôme maître/chien guide.
Rassurez-vous, lors des balades, la personne reste responsable de son chien. Il vous faudra simplement la guider et lui donner les informations visuelles nécessaires ( tel que l’arrivée d’une personne, d’un chien tenu en laisse, d’un vélo, d’un coureur etc).
Le droit aux loisirs pour les chiens-guides
De plus en plus de maîtres de chiens guides pratiquent ou souhaitent pratiquer une activité canine.
Je suis partisane du droit aux loisirs pour le chien guide et cela ne peut être que bénéfique.
Evidemment, il ne faut pas se lancer dans une activité dès la première semaine de vie avec son compagnon ! Chaque chose en son temps… .
Il faut connaître son loulou pour choisir l’activité la plus appropriée en fonction des envies de celui-ci et de nos propres capacités.
Par exemple, avec ma première chienne guide qui était une Golden, je souhaitais faire du Cani-cross. Elle n’aimait pas du tout tracter… . Nous avons trouvé notre bonheur dans l’Agility .
Ma seconde chienne, une Berger Belge Malinoise, adorait le Cani-cross… Elle avait même la capacité de me guider en courant.
Isis, ma louloutte actuelle, s’éclate davantage dans ce qui fait appel à son flair. nous avons rejoint une association Cynotechnique pratiquant le Questage et le Pistage (2 disciplines de recherche de personnes).
photo une personne non-voyante tiens sa chienne ( berger allemand croisé golden) en longe; la chienne piste et la maitresse est guidé par une personnephoto une personne non-voyante tiens sa chienne ( berger allemand croisé golden) en longe; la chienne piste et la maitresse est guidé par une personne
Plein de loisirs canins sont accessibles aux personnes déficientes visuelles avec leurs chiens; certaines pratiques demandent simplement qu’une tierce personne les guide.
Le plus important, il faut trouver un club canin, une association ou un professionnel, qui accepte d’accueillir ce duo particulier.
Car oui, il y a encore des réfractaires…
Alors allons plus loin en permettant à ces binômes d’avoir accès à ces activités .
Vous , qui proposez ou pratiquez ces différentes disciplines, faites-vous connaître , au près de Cani-Sphère , si vous êtes prêts à sortir de votre zone de confort .
Nous pourrions ainsi créer un réseau, facilitant l’accès aux activités canines pour les maîtres/chiens guides.
Coralie Vautrin
Éducatrice Canine / Intervenante Professionnelle en Médiation par l’Animal
Source : https://contactcanisphere.wixsite.com/cani-sphre/post/le-chien-guide-un-chien-avant-tout
Aidez l’association avec vos dons !
Adresse
CIE Chiens-Guides du Cœur
5 Résidence Berry
Allée de la Rotonde
77120 Coulommiers